Quand Rabat mise sur la rue: refonder le pouvoir, séduire l’Occident… et déstabiliser l’Algérie

Au Maroc, les images de foules en colère, scandant contre la faillite de l’école et la misère des hôpitaux, frappent l’opinion publique. Pourtant, derrière la façade sociale se dessine une stratégie autrement plus calculée. Car le Makhzen, loin de redouter l’explosion de la rue, semble au contraire l’exploiter. Laisser la colère s’exprimer, l’amplifier même, permet de justifier ce qui ne passerait jamais autrement : une refonte radicale du système de gouvernance.
L’objectif est clair : transformer le Maroc en un État décentralisé, proche d’un régime fédéral. Un pari audacieux, inspiré à la fois du modèle suisse, vitrine d’une démocratie fédérale apaisée, et de l’expérience irakienne, où la fragmentation territoriale a fini par stabiliser, à défaut d’unifier. Le pouvoir central entend ainsi répondre aux fractures régionales, canaliser les ambitions locales, et surtout mettre fin aux rivalités intestines au sein du Makhzen.
Ce choix institutionnel n’est pas neutre. Il vise à assurer un passage de relais sans heurts au prince héritier, tout en ménageant une place symbolique à son cadet. En d’autres termes, solder une fois pour toutes la guerre larvée de la succession. La rue, instrumentalisée, devient alors un levier: c’est en criant « réforme » que le pouvoir légitime son propre aggiornamento.
Les chancelleries occidentales observent ce chantier avec intérêt. Un Maroc « fédéralisé » apparaît comme un partenaire modernisé, plus flexible, plus prévisible. Mais surtout, il offrirait un sas de sécurité aux acteurs compromis du projet du “Grand Israël”, poursuivis par la justice internationale. Rabat deviendrait alors une plateforme discrète, mais incontournable, pour stabiliser un Proche-Orient en recomposition et accompagner la transition vers un nouvel ordre mondial.
Le problème, c’est que cette stratégie flirte dangereusement avec l’imprévisible. Car jouer avec le feu de la rue, c’est courir le risque que l’incendie échappe à ses instigateurs. Plus encore, le Makhzen espère que la flamme déborde ses frontières et gagne l’Algérie voisine. L’idée est transparente : détourner Alger de ses ambitions internationales en l’enfermant dans une crise interne.
Ce ne serait pas la première fois que Rabat s’aventure sur ce terrain. On se souvient déjà de la signature d’un accord militaire avec Israël, perçue comme une provocation directe contre Alger. Puis du forcing autour du projet d’autonomie au Sahara occidental, quitte à menacer sa propre cohésion territoriale. Aujourd’hui, le royaume pousse plus loin : instrumentaliser sa propre instabilité pour remodeler l’équilibre régional.
Et maintenant ?
Reste une interrogation essentielle: l’Algérie tombera-t-elle dans le piège? Les failles laissées par des gouvernements successifs, incapables de répondre aux attentes sociales, suffiront-elles à offrir au Makhzen l’opportunité d’exporter le chaos? Ou bien le peuple algérien saura-t-il, cette fois, faire mentir le pari de Rabat et déjouer cette tentative de fragilisation programmée?
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